Par Damijan Zupancic, Application Marketing Manager Solar & ESS chez Infineon Technologies
La nécessité de plus en plus pressante de réduire les émissions de carbone a entraîné une augmentation de la popularité des sources d’énergie renouvelables telles que les systèmes d’onduleurs solaires. Ceux-ci nécessitent des onduleurs légers, efficaces et à haute densité de puissance qui peuvent être interconnectés au réseau.
Traditionnellement, les transistors bipolaires à grille isolée (IGBT) constituent l’option privilégiée pour les onduleurs solaires triphasés et monophasés (≤10 kW), tandis que les transistors MOSFET à superjonction de silicium (SJ) (600/650 V) ont également été utilisés dans certaines applications monophasées. Cependant, les IGBT et les MOSFET Si SJ limitent l’efficacité et la densité de puissance que les onduleurs solaires peuvent atteindre.
Plus récemment, deux approches alternatives ont commencé à attirer l’attention : la première consiste à remplacer les IGBT et les MOSFET en silicium SJ par des dispositifs à large bande interdite tels que les MOSFET en carbure de silicium (SiC), tandis que la seconde remplace les topologies de circuit traditionnelles par une topologie multiniveau qui peut continuer à utiliser des MOSFET en silicium à plus faible tension. Dans cet article, Infineon examine les mérites relatifs de chaque approche et montre comment elles peuvent toutes deux être utilisées pour atteindre des niveaux d’efficacité allant jusqu’à 99 % dans les conceptions d’onduleurs solaires.
Option 1 : les MOSFET SiC remplacent les IGBT et les MOSFET Si SJ
En raison de leurs pertes de commutation élevées, les IGBT ne peuvent être utilisés que dans des applications dont les fréquences de commutation sont inférieures à 20 kHz. Les MOSFET SJ ont une charge de récupération inverse élevée (Qrr), une diode lente et un RDS(on) relativement élevé, ce qui a un impact négatif sur leur fonctionnement dans les applications d’onduleurs. Ces inconvénients limitent à un maximum de 98 % l’efficacité opérationnelle et la densité de puissance que l’on peut obtenir en utilisant l’un ou l’autre de ces dispositifs dans les conceptions d’onduleurs solaires monophasés typiques.
D’autre part, les MOSFET SiC sont dotés de diodes rapides, ont un Qrr très faible et présentent des pertes de commutation inférieures à celles des IGBT. Les MOSFET CoolSiC 650V d’Infineon peuvent remplacer les IGBT et les MOSFET Si SJ sans qu’il soit nécessaire de modifier la topologie du circuit utilisé dans un onduleur. Les MOSFET SiC peuvent commuter à des fréquences plus élevées, ce qui signifie que des composants de filtrage plus petits (inductance, condensateur) peuvent être utilisés, ce qui a pour avantage de réduire la taille et le poids du boîtier de l’onduleur, permettant ainsi de réaliser des économies en phase avec l’augmentation des niveaux de puissance. Les MOSFET en SiC présentent également des pertes de commutation nettement inférieures à celles des MOSFTET en SJ.
La figure 1 montre comment les MOSFET CFD7 CoolSiC 650V d’Infineon se comparent aux MOSFET SJ alternatifs dans des conditions de fonctionnement identiques et pour le même RDS(on).
Figure 1 Comparaison des figures de mérite pour les MOSFET SiC et SJ dans les mêmes conditions de fonctionnement et RDS(on)
La figure 2 montre les pertes par conduction pour trois commutateurs de premier ordre d’Infineon, notamment l’IGBT IKW30N65H5 650V TRENCHSTOP 5, le MOSFET SJ en silicium IPW60R031CFD7 600V CoolMOS CFD7 et le MOSFET CoolSiC IMW65R027M1H 650V à des températures de jonction de 25°C (à gauche) et de 125°C (à droite).
Il est clair que si les pertes de conduction des IGBT sont nettement plus élevées que celles des autres composants à 25 °C, elles n’augmentent plus lorsque la température de jonction atteint 125 °C. On constate également que les pertes de conduction du MOSFET SJ à 125°C sont deux fois plus importantes qu’à 25°C. Enfin, les pertes dans le MOSFET SiC n’augmentent que d’environ 20 % sur l’ensemble de la plage de température, ce qui donne un avantage sur les MOSFET au silicium dans les applications à courant élevé et à haute température telles qu’un onduleur solaire.
Figure 2 Comparaison des pertes de conduction à 25°C (à gauche) et 125°C (à droite)
Scénario 2 : passage à des topologies de circuits multiniveaux
Des topologies telles que Heric, H6, H6.5, employant des dispositifs IGBT 650 V et MOSFET SJ 650 V sont couramment utilisées dans les conceptions d’onduleurs solaires monophasés conventionnels. Cependant, une nouvelle topologie multiniveau basée sur des MOSFET à moyenne tension (150 V à 200 V) est apparue comme une alternative potentielle (figure 3).
Figure 3 Remplacement d’une topologie à deux niveaux par une topologie à plusieurs niveaux
Par rapport à l’approche conventionnelle, la topologie multiniveau a l’avantage de nécessiter un inducteur et un condensateur beaucoup plus petits, ce qui permet de concevoir un onduleur solaire à plus forte densité de puissance qui nécessite moins de refroidissement.
En outre, si l’adoption d’une approche multiniveau nécessite l’utilisation d’un plus grand nombre de MOSFET à moyenne tension, la chaleur dissipée en raison des pertes de puissance est répartie sur un plus grand nombre de composants, ce qui simplifie la gestion thermique et pourrait permettre de concevoir des onduleurs ne nécessitant pas de ventilateurs ou de dissipateurs de chaleur. Les composants semiconducteurs représentent généralement moins de 10 % de la nomenclature globale d’un onduleur de chaîne monophasé (≥ 3 kW).
En comparaison, le système de refroidissement et les composants passifs (condensateurs et inductances) représentent 30 à 40 % du coût total. En outre, alors que le prix des composants semiconducteurs tend à diminuer avec le temps, le coût des composants passifs est relativement statique. Par conséquent, pour les onduleurs solaires monophasés existants fonctionnant à des niveaux de puissance supérieurs à 3 kW, le passage à une topologie multiniveaux (qui utilise des éléments passifs plus petits et davantage de dispositifs semiconducteurs) est judicieux car il permet de réaliser des économies. Les onduleurs de puissance supérieure peuvent réaliser des économies encore plus importantes en adoptant une topologie multiniveau.
Un autre avantage important des onduleurs multiniveaux est que la perte de puissance inférieure par composant permet d’utiliser des MOSFET plus petits dans des boîtiers montés en surface (SMD). Les boîtiers SMD sont parfaitement adaptés aux processus automatisés de prélèvement et de placement, ce qui permet de réduire les coûts d’assemblage des systèmes. En outre, les boîtiers plus petits ont une inductance plus faible, ce qui permet d’améliorer les performances de commutation à des fréquences plus élevées. Un autre avantage important des onduleurs multiniveaux est leur évolutivité vers des niveaux de puissance plus élevés en utilisant une conception et une disposition de carte presque identiques. Toutefois, il convient de noter que, par rapport aux topologies conventionnelles, les onduleurs multiniveaux nécessitent un plus grand nombre de pilotes de grille et d’alimentations isolées.
Un onduleur solaire multiniveau MV MOSFET de 4 kW sans ventilateur ni dissipateur thermique
Pour étudier les performances de la topologie multiniveau proposée, Infineon a construit une carte de démonstration d’onduleur multiniveau monophasé de 4 kW, à cinq niveaux, basé sur des condensateurs volants, à point neutre actif et bridé (Figure 4) sur la base des spécifications de conception indiquées dans le tableau 1. L’avantage de cette conception multiniveau est qu’elle permet d’utiliser des MOSFETs OptiMOS 5 150 V 9,3 mΩ (BSC093N15NS5), même si la tension du bus est de 400 VDC.
Tableau 1 Spécifications de conception de l’onduleur multiniveau proposé
Figure 4 Schéma de la conception de l’onduleur à cinq niveaux
La figure 5 montre l’efficacité de cette conception mesurée en fonction de la puissance de sortie. Il a atteint une efficacité maximale de 99,1 % à une puissance de sortie d’environ 2 kW. À pleine charge (4 kW), il a continué à fournir un rendement exceptionnellement élevé (98,7 %). Une carte thermique de la carte à pleine puissance de sortie a montré que la mesure de la température maximale des composants était inférieure à 85 ˚C. Ces chiffres d’efficacité et de température expliquent pourquoi cet onduleur multiniveau peut fonctionner en continu sans avoir recours à un dissipateur thermique ou à un ventilateur.
Figure 5 Rendement en fonction de la puissance de sortie pour l’onduleur à cinq niveaux (à une fréquence de commutation de 40 kHz)
Conclusion
Bien qu’il soit plus facile de remplacer les dispositifs au silicium par des MOSFET SiC que de modifier la topologie de l’onduleur, cette approche n’améliore pas l’efficacité et la densité de puissance autant que l’approche multiniveau, ce qui signifie qu’un dissipateur thermique est toujours nécessaire aux niveaux de puissance inférieurs et qu’un refroidissement forcé peut s’avérer nécessaire aux niveaux de puissance supérieurs (> 5 kW). Bien qu’une topologie multiniveau soit plus complexe, elle peut offrir un rendement supérieur à 99 % et une densité de puissance élevée, ce qui justifie l’effort de conception.