Interview: Martin Cotter de ADI sur l’importance de l’Europe dans les semiconducteurs
Après l’annonce par ADI d’investir 630 millions d’euros dans son siège européen à Limerick, en Irlande, eeNews/ECI a obtenu une interview de Martin Cotter, Président d’Analog Devices EMEA.
Martin Cotter a récemment ajouté le rôle de président européen d’ADI à son poste de vice-président senior de Industrial and Multi Markets Business Unit. L’investissement à Limerick lui permet de prendre un bon départ dans son nouveau rôle. Il comprend la création d’un centre de R&D supplémentaire, le triplement de la capacité de fabrication de wafers et la création de 600 emplois.
Martin Cotter n’a pas fourni d’information sur la capacité de fabrication supplémentaire, mais a déclaré que l’important n’est pas tant le nombre de wafers que la variété des process et des produits qui peuvent y être fabriqués.
De plus, le calendrier du projet n’est pas certain car ADI a proposé sa participation à l’initiative de l’Union européenne sur les projets importants d’intérêt européen commun en matière de microélectronique et de technologies de la communication (IPCEI ME/CT). La demande est soumise à l’approbation finale de la Commission européenne. Cependant, le projet bénéficie déjà d’un haut degré de soutien de la part du gouvernement irlandais.
« On parle beaucoup des fonderies qui dépensent des milliards pour la fabrication de silicium haute performance pour les centres de données. Mais vous devez vous rappeler que toutes ces données proviennent d’interfaces du monde réel », a déclaré Martin Cotter . « A Limerick, nous fabriquons des circuits pour les véhicules électriques, l’industrie 4.0, les soins de santé numériques, les communications 5G, etc. Nous constatons une augmentation des besoins en silicium. Les fonderies investissent dans des nœuds numériques plus avancés, mais il n’y a pas assez d’investissements dans les nœuds à hautes fonctionnalités. «
Modèle économique de fabrication
Lorsque l’on considère l’investissement proposé à Limerick et une annonce similaire à Beaverton, dans l’Oregon (voir Analog Devices spending $1 billion on fab upgrade), il est clair qu’ADI ressent le besoin de garder le contrôle d’une partie importante de sa fabrication. Cotter a déclaré qu’environ 50% des besoins d’ADI sont actuellement sous-traités à des fonderies.
« Nous avons un modèle commercial de fabrication hybride », a déclaré Martin Cotter. En dessous de 65nm ou 40nm on passe en fonderie externe. Mais à des géométries plus élevées, nous avons des produits et des processus uniques que d’autres ne peuvent pas faire. Cela pourrait être une diode à faible bruit BiCMOS par exemple. Et puis il y a une partie au milieu, entre 180 nm et 90 nm que nous pouvons soit fabriquer soit sous-traiter. »
Martin Cotter a ajouté qu’ADI va bien au-delà de la simple fabrication de composants et que, dans les secteurs où elle opère, les clients souhaitent des couches de fabrication et du support logiciel. Cela pourrait donc prendre la forme d’un post-traitement pour l’ajout de magnétisme. ADI exploite également une usine de fabrication de dispositifs passifs intégrés (IPD) et peut proposer la fabrication au niveau des cartes et l’ajout de logiciels.
« Une partie de la force d’ADI est sa diversité ce qui signifie une diversité en termes de clients et de base de produits et aussi de services proposés » a déclaré Martin Cotter.
Bien que la majeure partie de la fabrication interne d’ADI soit basée sur le CMOS, la société réalise une partie de la fabrication de semiconducteurs et de la R&D sur de nouveaux matériaux tels que les matériaux à large bande interdite en carbure de silicium et en nitrure de gallium. « Nous faisons de la R&D sur des composants à large bande interdite et fabriquons du GaN », a déclaré Martin Cotter. « Le GaN est encore petit en termes d’utilisation finale, mais petit à petit à mesure que le GaN basse tension progresse, il peut être utilisé sur des applications industrielles. »
Pas une simple société de composants
Martin Cotter semble avoir pris sa fonction européenne au moment même où les tendances du marché mondial se déplacent vers le continent. En tant que région manufacturière, l’Europe est largement axée sur les secteurs de l’automobile, de l’industrie et des communications, tout comme ADI. « Il y a cinq ans, vous auriez pu me dire que ces marchés étaient liés au PIB mondial », nous explique-t-il. « Mais au cours des trois dernières années, cela a été moins le cas. L’automobile double le contenu électronique ; le contenu électronique moyen des robots/cobots est passé de 80 $ à 400 $. L’industrie 4.0, les véhicules électriques et la santé numérique connaissent tous une croissance annuelle à deux chiffres. »
Martin Cotter précise également que la quantité d’automatisation qui entre dans les nouvelles usines est étonnante. « Il y a quelque chose comme 60 usines de batteries flambant neuves à travers l’Europe, à environ 4 milliards de dollars chacune. Cela a donné l’exemple à de nombreuses entreprises industrielles qui modernisent maintenant leur fabrication pour consommer 25 % d’énergie en moins que les générations précédentes. »
« L’Europe a un rôle important à jouer pour être un leader dans la transformation de l’industrie, de l’automobile et de la santé », ajoute-t-il. « Il y a un changement dans le monde. La mondialisation est remplacée par ces tendances alternatives et ADI cherche à proposer davantage de solutions complètes. Il fut un temps où nous étions une entreprise de composants ce qui n’est plus le cas. »
Catalyseurs et incubateurs
La dernière annonce de R&D intervient un an après qu’ADI a annoncé un investissement distinct de 100 millions d’euros dans ADI Catalyst, son installation sur mesure de 10 000 m2 pour l’innovation et la collaboration sur son campus de Limerick.
« ADI Catalyst est un accélérateur et non un incubateur de startups. Il permet aux ingénieurs de nos clients de travailler aux côtés de nos propres ingénieurs R&D pour vraiment accélérer l’innovation. Ces collaborations se feront souvent avec des clients plus grands, mais pas toujours. L’important est de créer une technologie, la développer et l’intégrer au produit d’un client en un temps record. C’est cela que notre dernier investissement contribuera à accélérer. » explique Martin Cotter.
Ceci dit ADI possède son incubateur de startups « Analog Garage » situé dans le centre-ville de Boston, dans le Massachusetts. « Nous pensons à un hub Analog Garage pour accompagner le catalyseur ADI – quelque part en Europe » ajoute Martin Cotter en faisant allusion aux développements à venir. Rappelons qu’ADI est présent en Roumanie depuis quatre ans et Martin Cotter nous a déclaré que le développement en Europe de l’Est était une opportunité. Le Président d’Analog Devices EMEA reste persuadé que si 2023 présente des défis spécifiques en Europe, à plus long terme, le continent est bien placé pour stimuler le développement technologique et qu’ADI a l’intention de contribuer à ce processus et d’en bénéficier.
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